Le cours d'écriture de Marie

 Menu érotique

19h, Arrivée des invités

19h15, Apéritif : Kir Royal Champagne Grand Cru Négligé … les dames se dévoilent

20h, Entrée : Foie Gras de Canard aux Figues accompagné de son Chutney de Fruit de la Passion servi sur son lit de Pain Perdu … les dégustations commencent, les alcôves accueillent leurs visiteurs, premier tour …

Accord met & vin : Sauternes La Tour Blanche … paillettes et plumes, fourrures et franges, violettes, la caresse prometteuse d’un éventail, la transparence taquine de la dentelle … les jeux sont faits

21h, Plat : Sole des Bancs Sableux de Bretagne, Cuite Meunière sur l’Arrête … la mer s’invite sur le dancefloor, sa mousse salée épouse les chevilles perchées, les échancrures des robes couture se découvrent subtilement, on rêve, on s’émoustille, deuxième tour …

Accord met & vin : Coton Charlemagne Grand Cru Muzard … mousquetaires et courtisanes, inquisition, prohibition, interdit et bravade, fouets, cravaches, ça serre et ça relâche … rien ne va plus

23h, Dessert : Millefeuille à la Crème Légère à la Vanille Bourbon de la Réunion … effeuillage, onctuosité, opulence, métissage, grand final …

Accord met & vin : Ruinart Blanc de Blanc … on change de tenue, on sort les masques, on tire au sort, hasard, suspens, surprise, sensualité … refaites vos jeux  

1h, Le rideau tombe

1h15, Digestif : Hennessy fine de Cognac, cigare cubain et retour au calme … les invités repartent et je repose enfin ma tête pleine de souvenirs envoûtants sur les genoux de la maîtresse de maison, dont les douces mains m’accueillent avec la volupté des retrouvailles de l’intimité. Fin de spectacle. Tableau du couple bourgeois.   

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Pause (1)

Les plantes me manquent. Le soleil dans mes cheveux. Les abeilles. La lune et les étoiles. Le ciel bleu. Les nuages. L’absence du vent. Et soudain le vent. L’océan. La danse. Le monde. La passion. L’échange. La vie. Les bouquets d’églantines sauvages. Les épines chaudes, ensanglantées. Ma pivoine, ma tulipe, black, touchée. Lui. Ou lui. Ou à nouveau lui. Mon joyau dévoilé. Une bouche. Une statue. David. Michel-Ange. Le musée de l’Académie. La Toscane. Les hennissements des poulains. Les saules. Les oiseaux en vol. L’iconostase. Les bougies et l’encens. Les chansons. Mes gémissements, allongée. La joie. Le pêché. La folie. Toi, tu me manques. Toi, celui que je ne connais pas. Toi, celui que j’attends. Toi, celui qui m’était destiné. Toi, celui que l’on m’a volé. Toi, celui que j’avais imaginé. Toi, celui du songe. Toi, le potentiel bien aimé. Toi, le possible amant.

Stand-by. To be continued. Stop. Point et à la ligne. …

Quel est le sens de cette pause que je n’ai pas voulue ?

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Pause (2)

Si le soleil ne se levait plus

Si la terre s’arrêtait de tourner

S’il n’y avait plus de jour, ni de nuit

S’il n’y avait plus de saison

Si ta main s’arrêtait avant de caresser mon visage

Si tu ne me trouvais plus belle

Si tu ne me faisais plus jouir

Si je ne te faisais plus bander

Si nous n’étions plus là l’un pour l’autre

Si j’arrivais à t’oublier

S’il n’y avait plus d’amour

Plus rien n’existerait. La poésie serait ailleurs.

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Lettre (dernière)

Mon Dieu,

Aujourd’hui j’ai hésité à enfoncer un couteau dans ma poitrine pour en sortir mon cœur inutile.

J’ai imaginé le mettre dans un tupperware et le déposer dans la boîte à lettres de mon ex avec un mot écrit à l’intérieur d’une enveloppe « Tiens voici mon amour garde-le moi je ne peux plus l’utiliser, il est cassé pour toujours ». Il aurait été obligé de le mettre au frais pour qu’il ne pourrisse pas et de déchirer l’enveloppe pour lire à l’intérieur. Ou alors il aurait jeté tout à la poubelle sans remords, sans mauvaise conscience, heureux de s’être enfin débarrassé de cette folle. Il ne sait pas que j’ai toujours les clefs de chez lui.

Je me suis ensuite rappelé la première fois où il a épluché une poire pour moi : il l’a coupée en petits carrés qu’il a mélangés avec de la cannelle et un yaourt de chèvre frais dans un petit bol, c’était délicieux. J’aurais même pu la manger s’il n’avait pas rajouté de miel : je suis diabétique.

Mes pantoufles rouges poilus aux pieds, mes pieds sur la table basse, mon petit ourson dans mes bras, j’ai rafraîchi pour la millième fois son profil Facebook même s’il n’a plus rien posté depuis deux ans. On ne sait jamais. 

Je me suis resservie en flocons d’avoine – eau chaude – huile d’olive, mon porridge à moi que j’avais acheté pour lui – il m’avait dit « rien d’autre ne me cale comme ça jusqu’à midi ».

Quand j’ai fini de me faire vomir, j’ai enfilé ma doudoune rose – mes boucles d’oreilles double fleur s’accordent tellement bien avec elle – et je suis sortie faire une balade dans le bois de Boulogne – j’aime bien voir les trans tapiner quand je me sens triste.

Merci mon Dieu d’être là pour moi. Sans Toi je serais sûrement encore plus seule.

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Point de vue : Le psy de la belle-mère de Blanche Neige

La marâtre interroge le miroir pour savoir si elle est la plus belle. Quand elle se regarde, elle ne voit que ses imperfections, comme si son miroir la déformait, comme si ses yeux étaient cassés. Elle se compare à Blanche Neige, qu’elle trouve plus belle qu’elle, et le désespoir l’envahit. Elle perd sa confiance en elle, son sang-froid, sa raison. C’est à ce moment-là qu’elle se propose de tuer Blanche Neige. Le conte ne le raconte pas, mais j’imagine que même si elle arrivait à ses fins, la reine ne trouverait pas la paix. Bientôt, il y aurait une autre jeune fille dont la beauté éclipserait la sienne. Ce n’est qu’en apprenant à s’apprécier telle qu’elle est, et à se trouver de la valeur pour ce qu’elle est : un être vivant, avec ses qualités et ses envies, qu’elle pourra vivre sa vie à son plein potentiel. C’est en suivant ma thérapie qu’elle y arrivera.

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